Pour ou contre : faut-il mettre fin à l'anonymat sur les réseaux sociaux?

Débat avec Eric Ciotti sur l'anonymat des réseaux sociaux.

Pour ou contre : faut-il mettre fin à l'anonymat sur les réseaux sociaux?

Après l'attaque terroriste qui a coûté la vie au professeur Samuel Paty, le débat sur la fin de l'anonymat sur Internet revient au premier plan.

OUI / "Sortons de l'hypocrisie, l'anonymat est une invitation larvée à l'irresponsabilité"

Par Eric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes.

La barbarie qui a fauché Samuel Paty a non seulement démontré l'expansion terrifiante de l'islamisme dans notre société mais aussi la responsabilité des réseaux sociaux dans sa propagation et sa viralité. L'attentat de Conflans-Sainte-Honorine fait apparaître, aux yeux d'une nation stupéfaite, des organisations islamistes dématérialisées très actives qui ont pour objectif de changer la France en y imposant la charia. C'est via un réseau social qu'un parent d'élève a appelé à la haine contre Samuel Paty. La voix de ce parent malveillant a été relayée par des officines islamistes pour propager son message. Message qui a été entendu depuis la Normandie par le terroriste Abdoullakh Anzorov et a provoqué son passage à l'acte. Le terroriste est allé jusqu'à publier, sous pseudonyme, des photos de la dépouille du professeur sur un autre réseau social, comme vitrine mondiale de sa barbarie.

Sortons de la naïveté, ces plateformes provoquent un déferlement de haine à visage masqué inédit dans l'histoire humaine. Dissimulé derrière un écran et sous pseudonyme, tout ce qui est interdit dans la rue et dans le monde physique devient possible sur Internet : insultes antisémites, harcèlement sexuel, remarques sexistes, homophobie....

Je suis particulièrement préoccupé par le sort de milliers de jeunes Français harcelés anonymement par des camarades de classe, comme la jeune Mila, menacée de mort depuis bientôt un an car elle a osé critiquer l'islam, ou par celui de policiers ou gendarmes dont les adresses sont dévoilées en ligne.

Je suis tout aussi inquiet pour les militants du courage, comme Zineb El Rhazoui, menacés de mort par des islamistes ou encore pour les Français de confession juive insultés. Il ne s'agit ici nullement d'interdire mais de responsabiliser les réseaux sociaux et leurs utilisateurs. Débattre sous sa véritable identité, ce n'est pas voir sa liberté amputée mais bien assumer sa responsabilité avec courage. Sortons de l'hypocrisie, l'anonymat est une invitation larvée à l'irresponsabilité. Interdisons l'anonymat sur les réseaux sociaux en rendant obligatoires les contrôles d'identité à travers la fourniture d'un document et une déclaration de responsabilité, comme je le propose depuis 2016 à l'Assemblée nationale.

NON / "Des moyens techniques permettent déjà d'identifier facilement un individu"

Par Tariq Krim, entrepreneur du numérique, ancien vice-président du Conseil national du numérique.

L'anonymat n'existe pas sur Internet. Il s'agit, en réalité, d'un pseudonymat derrière lequel un utilisateur peut parfois se cacher. Toutefois, des moyens techniques permettent facilement d'identifier un individu. Le problème réside davantage dans la mauvaise volonté dont font preuve les plateformes pour réaliser cette identification et les faibles moyens alloués à la justice pour agir rapidement.

Si l'assassinat de la semaine passée a permis d'acter enfin une augmentation des ressources de la justice deux éléments continuent d'être des goulets d'étranglement. Tout d'abord le manque de fluidité entre les fournisseurs d'accès et la justice : les données réclamées devraient être disponibles immédiatement et à un coût marginal. Le second concerne les réseaux sociaux (Facebook, Twitter...) qui ne souhaitent pas automatiser ce procédé, certes coûteux, mais facile à réaliser.

Ces solutions ne restent pour l'instant que des pansements. Il faut ouvrir les yeux sur le modèle économique toxique des grandes plateformes, qui se sont immiscées dans notre intimité et qui ont fragmenté et pollué les débats politiques dans le monde. Elles ont offert aux idéologies de haine des outils d'amplification algorithmiques sans équivalent dans l'histoire.

Aucun sociologue n'a d'ailleurs été à même d'expliquer comment ces algorithmes ont influencé les opinions de la population française.

Ce que l'on voit sur Twitter n'est que la partie émergée de l'iceberg. Nous sommes tous enfermés dans des bulles créées sur mesure, sans avoir conscience que notre voisin est train de se radicaliser avec ces mêmes outils.

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